Tous mes remerciements à Laurent de Gastros on Tour sans qui le moment n’aurait pas été possible.
Cela m’arrive peu, mais lorsque je vis un moment à part au restaurant, j’essaie de trouver la justesse des mots, des sensations et en même temps, j’ai l’impression de ne pas tout dire. Est-ce l’envie de laisser une part de mystère, est-ce que cela appartient trop à l’intimité ? En tout cas, c’est arrivé, chez Noma, comme à L’Astrance, au Sa.Qua.Na. Il y a des lieux comme ça, je les découvre par pur plaisir, loin de mes engagements professionnels, j’y prends un plaisir fou, j’essaie de vous le traduire, mais sans tout pouvoir (vouloir ?) vous dire.
Aamanns, un prélude inattendu. Ce bistrot charmant nous fait découvrir des compositions pas si éloignées de celles de Noma, on apprendra plus tard que le chef y a travaillé quelques temps. Après une composition de rillettes de cou de porc (extra fondantes), de croûtons de pain, de chutney acidulé et de feuilles de chou de Bruxelles crues, voici le plat, à mon grand désarroi plongé dans l’obscurité (et ce n’est que le début).
Joue de bœuf et oignons en trois façons. Les voici crus, compotés légèrement acidulés et frits. Viande extra fondante, sensations délicieuses à l’approche de ces trois oignons.
Aamanns, Øster Farimagsgade 10, 2100 København Ø
24 heures plus tard, on arrive dans un quartier réhabilité de Copenhague, avec beaucoup d’allure, des entrepôts transformés en lieux de vie, d’habitation, de perdition (Noma). Noma du chef René Redzepi, l’un des meilleurs restaurants au monde dit-on, situé en bordure de quai, d’un côté, les bateaux à quai, de l’autre, la rive en face avec ses bâtiments déclinant le noir. Un endroit déjà à part. Noma entretient un rapport particulier avec ses équipes, en salle comme en cuisine, c’est apparent dès l’entrée. Chaque membre a un rôle à tenir, un plaisir à faire passer, j’y reviendrai sur un autre support (L’Hôtellerie Restauration), la journaliste que je suis ne peut s’empêcher d’en faire l’écho…
Noma apparaît comme un lieu incroyablement bien ancré dans son époque.
La salle vous habille de bois, de lumière douce et enveloppante, de magnifiques chaises au design scandinave, années 50 (bien loin des Jacobsen). Sur certaines, on remarque des peaux de bête (blanches, de lapin peut-être ? là j’avoue je sèche), comme jetées au hasard sur les chaises. Un côté brut, retour aux sources, délibérément donné au lieu et qui dégage un charme fou. Noma, c’est une relation frontale avec l’environnement (les quais, la pierre) et le territoire danois (les produits, le local sans cesse mis en avant). Allez, on attaque, presque dans le noir, enfin non, mais disons que la lumière est si douce que… Le hasard fait bien les choses, aucun des mets servis en début de repas n’apparaît clairement sur les photos, j’ai compris qu’il y avait parmi eux des « classiques » de la maison (la boîte à biscuits, l’œuf fumé…), pour ceux qui tentent leur chance, le mystère ne sera pas percé, c’est mieux ainsi, l’étonnement n’en sera que plus entier. Des photos prises au cours du repas, quelques-unes ont pu être sauvées, avec un ajout maximal de lumière, voyez ces photos plus comme des illustrations (le grain est tellement épais, qu’on dirait des dessins). J’insiste, voyez ceci comme une vision pas tout à fait nette (onirique ?) de grands moments en bouche, de sensations indicibles. Des assiettes que j’ai perçu comme autant de paysages à franchir, traverser, gravir, à savourer dans les moindres détails, sachez que plus on avance, plus c’est bon.
Des tranches fines de betterave, un jus de verdeur et des pépites croustillantes au parfum d’ail.
Des noix de saint-jacques cuites près de 8h au four à 60°C, ce qui explique cette couleur insensée. Les tranches minces, pas vraiment séchées, accompagnent un mélange de graines locales cuites dans un jus vert et un coulis noir dans le fond de l’assiette.
Des tranches de châtaignes crues, des œufs de poisson au diamètre infime, des éclats de noix, une crème beurrée servie délicatement en salle à l’assiette.
Un salsifis presque confit, recouvert d’une peau de blanc d’œuf et accompagné d’une crème de truffe noire (locale).
Des morceaux de joue de bœuf comme laquée, servis avec des cœurs d’endive fondants et des tranches de poire crue, encore un peu verte.
La carotte, en crue, en glace, en sorbet (à l’intérieur de la glace).
Dessert sur le thème de la noix, une poudre qui s’assemble en bouche pour former une matière délicieuse, parfumée à la noix, comme la glace présente aussi dans ce dessert.
Le livre de vins est exceptionnel, beaucoup de vins naturels, comme le Savennières 2001 qui a accompagné notre repas, avec tout de même une petite incartade pour le Pommard de Fanny Sabre (vigneronne qui n’a pas 30 ans) durant la joue de bœuf…
L’addition finale vous demandez-vous ? presque 400 € à deux pour le menu « big », mais pas le plus « big » non plus et l’exclusivité de plats créés depuis quelques heures par le chef. Vous l’aurez compris, je n’ai repris ici en photos qu’une partie du dîner.
Noma, Strandgade 93, North Atlantic House Cultural Centre
miammmm….
😉 j’aurais bien aimé utiliser tes photos, mais comme je te le disais, mes écrits restent fidèles à ce qu’ils ont vu (do you understand ? sorry…) 😉
haha. non, non. c’est mieux comme ça.
p.s. j’ai mangé le même plat à Aamann’s aussi.
a défaut d’aller à Copenhague, le second du Noma vient cuisiner à paris le 12 avril. j’ai hâte de gouter sa cuisine
Marie, oui, oui, ça s’annonce bien.