Agapé

2 Avr 2008 • 750176 commentaires

Laurent Lapaire, ancien directeur de salle d’Alain Passard à l’Arpège (Paris, 7e), vient d’inaugurer sa table à lui. Entre les mains du chef Bertrand Grébaut (ancien de Passard aussi, quand on dit « ancien », sachez que le chef a 26 ans), l’inspiration légumière de Passard est joliment présente, d’ailleurs ses légumes ne devraient plus trop tarder (Alain Passard cultive un jardin potager du côté de la Sarthe, qui fournit de plus en plus de tables sur Paris). Côté service, Laurent Lapaire envoie des vagues d’enthousiasme et de bonheur à l’idée d’être chez lui. Une salle très cosy, plongée dans les rose violine (typiquement la couleur impossible à définir) et les gris taupe, des couleurs qui installent une ambiance douce et sereine, à peine éclairée par les multiples abat-jours suspendus au plafond. Jetez un œil aux grands miroirs qui se font face, ils se reflètent l’un dans l’autre à l’infini, laissant une petite impression de vertige. Tandis que les quelques tableaux émettent des couleurs et des motifs aborigènes épatants. Les tables sont dressées de sobriété et de chic, Laurent nous a confié les différents noms qui composaient le dressage, Andrée Putman, Bernardaud, des créations exclusives pour Agapé. Mais ce n’est qu’un début, les « grands » noms de la gastronomie font leur entrée et on ne manque pas de vous le divulguer.

190-AgapeLe beurre de « Jean-Yves Bordier, » au sel fumé à gauche, doux à droite, autant vous dire que je n’ai pas touché à ce dernier… Pour les accompagner, c’est une petite baguette de chez « Jean-Luc Poujauran », joliment façonnée, dense et croustillante à souhait. Elle est là pour quelques temps, ne tardez pas à aller la goûter.

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Crème de fenouil sauvage crémeuse et voluptueuse, olives taggiasche en éclats (des petites olives italiennes teintées d’amertume et de raffinement) et croûton recouvert de lard de Colonnata, ce gras d’un blanc immaculé qui vous couvre le palais de saveurs et de rusticité. On se régale.

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Velouté de racines de persil légèrement sucré et très gourmand et son écume de feuilles de persil délicate et parfumée, lorsque l’assiette arrive, l’écume est en ébullition et ne cesse de faire des bulles, il y a un côté marécage amusant. Cela nous rappelle la nature, à n’en point douter. Vous pouvez également apercevoir des gouttes d’huile d’olive d’un jaune d’or appétissant.

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Le filet de Saint-Pierre généreux est de toute beauté, caché par une émulsion d’huître absolument exquise. Les pommes grenailles de Noirmoutier craquent un peu sous la dent. Les filaments d’herbe apportent une note verte très discrète. Vous pouvez aussi apercevoir la robe d’un blanc de rolle, Les Sarrins, exceptionnel, un vin de Draguignan dans le Haut-Var, au cépage unique (le rolles plus connu en Italie), qui nous a déployé une grande complexité, de multiples parfums.

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Soupe glacée de carottes, orange sanguine. La soupe au goût sucré et très naturel de carotte est ragaillardie par le sorbet à l’orange sanguine, d’une texture divine et à la saveur intacte de l’orange sanguine, cette légère amertume, ce côté acidulé, tout en délicatesse et en gourmandise. A la deuxième ou troisième bouchée, je sens des petites billes claquer sous la dent, acidité subtile, goût de citron, c’est du citron caviar. Une variété de citron que quelques chefs utilisent, toujours avec parcimonie et c’est tant mieux, l’effet est audacieux justement s’il est rare.

Pour accompagner le café, le chocolat à la menthe (un goût de menthe fraîche incroyable) et le caramel aux fruits de la passion de Jacques Genin (chocolatier parisien qui fournit un certain nombre de grands établissements, en attendant l’ouverture de sa boutique à la rentrée, on en frémit d’avance…) font sensation.

Vous l’aurez compris, les noms, les meilleurs sortent ici grands gagnants, on est heureux de les re-découvrir. La cuisine de Bertrand Grébaut se fait délicate, savoureuse, respectueuse, elle mérite donc toute notre attention, avec un bel éventail des textures du moment : velouté, crème, émulsion, écume… On a eu un peu peur de perdre la mâche de vue, mais non et les saveurs se sont bel et bien défendues.

Le menu goûté ici correspond au menu déjeuner : 39 €, autre menu : 77 € et à la carte, comptez : 60 € environ

Agapé
51 rue Jouffroy-d’Abbans
75017 PARIS
T 01 42 27 20 18
Métro Wagram

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6 réponses à Agapé

  1. Laure dit :

    On ne se refuse rien Caroline, ça a l’air drôlement bon en tout cas 🙂

  2. C’est marrant comme l’air de Paris transporte à toute vitesse les rumeurs culinaires. Un ami m’en a parlé aujourd’hui même. Il a trouvé cela très bon, avec une vraie recherche, de l’inventivité ludique dans les assiettes. Son seul bémol, le dessert, qui était, coïncidence, le même que le tien et qu’il a trouvé un peu bancal, et même « raté » pour le citer. Pour le déjeuner, à deux, ils en ont eu pour 106 € avec un verre de vin. Pas très cher pour un déjeuner d’affaires.
    (Sinon, c’est AndréE Putman, le designer est une femme). 😉

  3. Caroline M dit :

    – Laure, fidèle à mes habitudes !
    – Thierry, oh la honte, Andrée Putman sans E, j’ai failli ! Merci pour la reprise, je corrige.
    Quant au dessert, chacun des deux éléments étaient vraiment bien exécutés, peut-être que la combinaison des deux n’était pas la plus heureuse qui soit, j’étais légèrement circonspecte, la personne qui m’accompagnait trouvait cela harmonieux. Comme quoi les goûts… Si je devais m’agacer d’un truc : il y avait bien ces filaments d’herbe qu’on avait déjà sur les pommes grenaille…

  4. Eliz dit :

    Quel agréable moment tu as du passer!…
    Je reste savourement intriguée par le velouté de racines vertes si « expérimental » et le mélange des genres et saveurs de ton dessert!
    Superbe!

  5. Eric C. dit :

    rolle, sans « s » 🙂
    (vermentino en italie, effectivement)

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