« Pas un jour qui ne se ressemble », c’est l’une des phrases que je dois le plus prononcer lorsqu’on me demande en quoi consiste mon travail. Une chance, sans aucun doute. De la diversité, des rencontres, des ambiances, des paysages… Des situations dans lesquelles je ne me serais jamais imaginé quelques années, mois ou jours auparavant, des instants de vie singuliers, extraordinaires pour moi et complètement anodins pour d’autres. Je vois l’extérieur des choses et par moments l’intérieur. Et lorsque je suis en parfaite osmose avec l’objet de ma concentration, il arrive que des choses surréalistes apparaissent. J’ai eu envie de vous en faire partager un petit bout de temps en temps, des sensations et votre imagination fait le reste. A propos de sensations, le film Amore en est richement pourvu, je le prescris à ceux qui sont mal de, sans parler des moments de cuisine comme on en voit peu au cinéma.
Allez, je me lance… Voyage avec le chef Jérôme Jaeglé, candidat français au Bocuse d’Or, afin de découvrir les produits écossais qu’il travaillera pour la finale en janvier prochain. Au passage, je lui souhaite le meilleur.
L’agneau d’Ecosse, dans ses plaines sans fin.
Vous sentez le vent frais ? Peut-être ne voyez vous pas les nuages filer à vive allure, mais je peux vous assurer qu’on manque de s’envoler.
Des gestes fascinants à regarder, à défaut de les avoir filmés… Nous sommes à l’abattoir d’agneau, les carcasses défilent sur les crochets.
Si on ne les a pas vus sur pieds, on nous emmène à l’abattoir de boeufs quand même pour notre information, notre intérêt. La température d’un frigo, vous sentez le froid ? Une odeur qui vous prend aux tripes les premières secondes, vous vous demandez si vous n’allez pas faire demi tour vite fait et rendre votre petit-déjeuner. La première aller à traverser entre les carcasses est plus qu’étroite. J’opte pour la marche en crabe, le nez qui frole les carcasses, l’arrière aussi. Et puis les secondes passent, l’odeur s’estompe, la vision est surréaliste, une hauteur de carcasse vertigineuse et ces muscles magnifiques…
Ceci n’est pas du Francis Bacon. En y regardant bien, cette mousse blanche me questionne. Lorsque je demande pourquoi, on m’explique que lorsque on arrache la peau comme on enlève un manteau, ça produit ces effets sur le gras.
Lorsqu’on fait ce « fameux » métier, c’est un regard indispensable, d’acceptation, de conscientisation et une esthétique sensationnelle, j’espère que vous le ressentez.
Bonosir Caroline,
Ce sont des sentiments et des sensations qui nous font vibrer. Il faut le sentir pour le vivre et pouvoir en parler. C’est intime et hédonique.
La découverte d’une sensation à la vue d’un produit – l’étonement – le toucher – le sentir – le préparer – le cuisiner -le valoriser – Pourquoi lui plutôt qu’un autre – le déguster – le savourer- en parler – échanger –
Belle soirée
Ces écorchés ne sont ni obscènes ni écoeurants, et je partage ton sentiment un peu onirique, noblesse de métier et de gourmet.
– Anne-Hélène, merci pour vos mots !
– Patrick, je suis enchantée que tu partages mon sentiment et un grand merci pour la dernière partie de la phrase…
En fait, je suis contente que cela ne vous laisse pas indifférents, j’hésitais et en même temps, j’avais très envie de vous faire partager ces visions.