Depuis le temps que les consoeurs et confrères en parlaient (ouverture en novembre 2012), il me tardait de fouler la porte de cette nouvelle table, présentée souvent comme celle de deux anciens d’Alain Passard. L’un en cuisine, l’autre en sommellerie (d’ailleurs, la cave coeur de la maison à l’étage affiche de sérieuses cuvées et des années comme on n’a pas idée). Il est sûr que Passard ça en impose, en même temps, une fois qu’on a dépassé l’idée, on se fait surtout plaisir, grave. Comme je venais pour rencontrer les instigateurs du lieu, j’ai été installée au comptoir du rez-de-chaussée qui n’est autre que l’avant-scène de la cuisine. Juste devant moi, le chef et sa brigade sont en plein coup de feu (13h30) et moi je sens vite le feu aux joues (et quelques fumets de cuisine, mais pas trop tenaces, je vous rassure… ça ne m’empêchera pas de réserver au comptoir une prochaine fois). Bref, en lien direct avec la cuisine, ses échanges courts et ses visages concentrés, je me penche moi dans ma petite brioche/mise en appétit avec beaucoup de sérieux.
Une brioche encore chaude, au petit épeautre et au cantal, servie avec son condiment moutarde et je ne sais plus. Miam.
Ravioles de joue de lotte, crème poutargue, oeufs de truite de Banka et cette petite chose verte et violette au premier plan que j’ai du montrer au chef pour savoir ce que c’était : « un chou de Bruxelles ». Oh la pépite nerveuse qui envoie du jus, du vert et du goût, j’ai adoré. « Pas facile de les avoir » dit-il dans un sourire satisfait de les avoir remportés, tu métonnes (fournisseur : Terroirs d’avenir). Je n’aime n’aimais pas trop les oeufs de poisson, c’est parce que je n’avais pas encore goûté ceux de truite de Banka (un délice que j’avais découvert chez Andrée Rosier à Biarritz) : la peau qui perce dans un bruit sec (je dis ça, en même temps, le bruit est étouffé par ma bouche), la saveur iodée, mais subtile, hmm. Les ravioles sont garnies de joue de lotte, mais pas seulement, c’est toute une petite farce en finesse. Je crois que la photo parle d’elle-même.
Saint-Jacques, calamars, pleurotes, truffes, bouillon de champignon et cardamome, pousses diverses, je n’en laisserai pas une goutte.
L’agneau en deux services, à commencer par la selle grillée et servie rosée, son jus (parfois, me dis que le jus d’agneau est l’un des meilleurs jus de viande, je ne sais pas si quelqu’un parmi vous y a déjà pensé ?), son condiment anchois et ses petits poireaux pleins de sève.
Les légumes roulés dans du beurre, pommes de terre, endive, crosnes, chou-fleur et j’en passe… Fermes, juteux, limite croquants (crosnes), bien enrobés, je me régale. Et j’oublie de prendre en photo le 2e service d’agneau, l’épaule confite. Avec sa couche de gras bien infiltrée, sa peau incroyablement croustillante, sa chair confite, je crois que j’ai ce sourire idiot tout le long de l’assiette.
Hmm, ganache chocolat, purée poire, mousse courge butternut et streusel un poil salé, c’est bon et drôle de voir que la courge se fraie une place pas usurpée du tout (l’onctuosité de sa chair, sa saveur douce et sucrée) dans les desserts de chef (chez Yam’Tcha d’Adeline Grattard, souvenez-vous).
Mousse de ricotta sicilienne et déclinaison d’agrumes. Un dessert vif et acidulé, parfait pour terminer.
Dans le cadre de l’article que je préparais sur Garance, j’ai eu un menu enrichi d’une entrée et d’un dessert et qui ne correspondait donc pas tout à fait à celui du déjeuner à 34 €. Ce dernier comporte mise en bouche, entrée, plat, dessert et mignardise (avec un choix parmi ce que j’ai pu goûter). Avec un menu d’une telle tonalité, dans ce cadre et dans le quartier (à deux pas d’Invalides et des ministères), je reste très enthousiaste. A l’étage, l’ambiance est différente, plus intimiste, plus feutrée, à 4 convives ou plus ça se prête bien mieux. Le soir, menu à 65 € et 135 €.
Garance, 34 rue Saint-Dominique, 75007 Paris, 01 45 55 27 56, métro Invalides
je ne suis habituellement pas une grande amatrice de ces desserts tout en crème et mousse; des jolies quenelles et bouts de sauce mais là… Alors là… je me damnerais pour ces deux assiettes.
Un chef bourré de talent, un sommelier tout autant, une équipe toute en humilité et égards et des assiettes… à se damner! Garance est le gros coup de coeur de ce début 2013! Je partage votre enthousiasme Caroline, bravo pour ce bel article qui reflète parfaitement la qualité du lieu.
très très tentant. S’ils arrivent à me faire manger des oeufs de poisson, ce serait un exploit pour moi qui met de côté le caviar 🙂
– Riane, je suis pareille que vous, j’ai besoin de textures. Heureusement, les parfums se répondaient bien, mais j’avoue que je peux me lasser dans les mois qui viennent…
– Clemalem, merci vivement !
– Marie, ah vous aussi ?