J’ai fait ma première expérience de La Jeune Rue, un projet pharaonique mené par Cédric Naudon déjà à l’origine du Sergent Recruteur avec le chef Antonin Bonnet. La plupart des enseignes de la rue du Vertbois (Paris IIIe) sont destinées à devenir un ensemble de commerces de bouche et de restaurants aux décors imaginés par des architectes des quatre coins du monde et faisant partie d’une même philosophie, le choix des paysans vertueux, le respect des territoires, de la biodiversité, les engagements sont en ligne. Les noms des futures enseignes aussi, avec des noms qui rendent impatients, L’Écorcheur (la boucherie), la Galerie des Glaces (le glacier), le Pain du Sergent (la boulangerie), Club Privé Japonais, Distillato et bien d’autres. Il y a quelques jours, j’aperçois sur les réseaux sociaux (La Jeune Rue sur Twitter) quelques photos d’Ibaji, le restaurant coréen du projet, qui venait d’ouvrir ses portes. Un décor signé Paola Navone sans référence aux restaurants asiatiques traditionnels, une cuisine annoncée comme populaire, de partage et raffinée, je veux y aller vite et débauche un ami hier midi. L’effet de remonter la rue est étrange, tous les pas de porte sont en travaux, annoncent du mouvement, de la création. A 12h15, nous franchissons les portes d’Ibaji (pas de résa possible). 23 places assises, la moitié autour d’une grande table à partager et l’autre à un comptoir face aux murs. Décor de carreaux cassés thème récurrent du sol aux murs, objets colorés suspendus au plafond, esprit qui casse les codes, j’aime bien l’idée. On s’installe face aux carreaux cassés. Ma chaise a le dossier vide, c’est à dire que les contours sont là, mais j’ai l’impression d’avoir le dos qui passe à travers. Mon ami plus grand que moi propose d’échanger sa place avec la mienne, tout va mieux (oui, il y a une alternance de chaises, un modèle avec dossier plein et l’autre avec dossier vide). Formule déjeuner avec plat à choisir à la carte, soupe, kimchi et banchan, à 19 €, on y va.
Je choisis le plat de riz, de légumes et d’épaule de porc confite (bibimbap). J’aime beaucoup le matériau aux allures de marbre (il est ici brûlant et non pas froid comme un marbre de pâtissier 😉 C’est appétissant, des concombres marinés, des carottes, des pousses de soja, du porc confit, des champignons bien saisis et un jaune d’œuf. Le tout cache un riz blanc et violet (mélange de riz et de céréales), on me suggère de mélanger et d’ajouter du piment. Une pâte de piment de teinte bordeaux servie à côté. Je commence, les champignons sont savoureux, les concombres pas vraiment assaisonnés malgré leur texture de concombre mariné, la viande délicieuse mais pas trop assaisonnée non plus, j’avance, je me dis que ça manque un peu de saveur. Mon ami qui goûte aussi me dit que ça manque de « …ie », je lui fais répéter (il faut dire que la salle s’est remplie et que les carreaux cassés, ça aime bien faire rebondir les voix), ça manque de vie me dit-il. A la fin, je sens que ça croustille et colle un peu aux dents, en fait le fond du riz en contact avec le bol a bien grillé, ça c’est très bon. Mon ami a pris un burger. J’essaie de ne pas trop commenter, mais des burgers (à la carte, il y en a tout de même deux sur six plats), il y a des lieux pour ça. Sur la grande assiette blanche, deux mini burgers à l’air un peu étriqué garnis de morceaux de kimchi, d’une feuille de laitue, d’un petit steak haché et d’une tranche de laguiole fondu. L’interprétation du burger entre Corée et Aubrac, moi je ne suis pas convaincue.
Chacun a sa soupe, un bouillon bourré d’algues et de quelques moules, je fais le plein d’algues c’est bien. Il y a aussi trois coupelles de légumes à partager, des lamelles de chou fermenté au piment (kimchi) et deux autres de légumes acidulés (le banchan correspond en Corée à ce qui accompagne le plat, un assortiment de coupelles de petits plats et condiments cuisinés différemment). Moi je trouve les portions à partager petites, avec mon ami, on a l’air de pas trop y toucher, ne sachant pas si c’est pour l’un ou l’autre. Non vas-y, le dernier des trois est pour toi.
Au final, il persiste chez moi quelques incompréhensions, je n’arrive pas à saisir la recette de burger (et même la présence de deux burgers dans la carte), la cuisine définie coréenne et généreuse qui me semble revisitée par moments sans que je comprenne le sens. Peut-être qu’en commandant plusieurs entrées (pas vraiment goûtées pour le coup), on atteint cet esprit de générosité, de découverte et de partage comme c’est présenté sur le site. Mais l’étroitesse du comptoir le long des murs ne le sous-entend pas vraiment. C’est bizarre comme positionnement. Mieux vaut alors prendre place à la grande table et partager avec vos voisins, c’est une idée non ?
A la carte le midi, entrées entre 5 et 10 €, plats entre 11 et 14 €, desserts à 5 €, formule à 19 €, le soir, comptez 30-35 €
Ibaji, 13 rue du Vertbois, 75003 Paris, 01 42 71 67 81, métro Temple
Je trouve incroyable et passionnant le concept de la rue du Vertbois, par contre ils devraient laisser une boîte à critiques/suggestions à la sortie de chaque nouvel établissement, parce que la colonne vertébrale d’un lieu et d’un thème ne peut pas partir dans tous les sens : ce n’est pas parce que tu fais de la qualité etc. etc. etc. que tu peux pertinemment faire tout à la fois. Une bonne cuisine coréenne, c’est de la cuisine bien assaisonnée et bien goûtue, pas du burger et des concombres fades !
Trop mignon les portions tellement congrues qu’on n’ose pas en déposséder son convive… Ton ami a de la chance d’avoir déjeuné avec toi et pas avec moi. 😉
Merci Caroline, tu me fais bien rire !
Attention Caroline aux jugements un peu trop hatifs sur ce que doit etre ou ce que l’on croit connaitre de la cuisine coreenne depuis Paris….Une bonne cusine coreenne???? Etes vous deja alle en Coree? Avez-vous pu apprecier les differences de saveur entre Seoul et Busan?
Peut-etre que le terme burger est impropre….
Je ne suis pas encore alle chez Ibaji, mais j’ai hate de m’y rendre pour en particulier gouter au tartare!
Jacques, je ne crois pas avoir laissé entendre que je connaissais bien la cuisine coréenne. Mon expérience se limite effectivement à Paris, à L’Arbre de Sel, Sobane et à un ou deux boui-boui de différents quartiers parisiens. Je n’ai pas de jugement hâtif sur l’adresse, je fais seulement part d’interrogations et de mon manque d’enthousiasme sur le fait d’associer le kimchi et le laguiole fondu et à un manque d’assaisonnement selon moi qui n’est ni lié à des goûts français, japonais ou coréens, mais qui correspond à mon goût. Je n’engage ici que mon goût.
Ca me laisse perplexe cette adresse, ainsi que la rue.
Beaucoup de bruits autour, peu d’activité par rapport à tout le chamboulement annoncé.
Bref, patience pour les ouvertures suivantes.
C’est ça, la patience est de mise je crois dans le cas de La Jeune Rue.