Le Chateaubriand

7 Avr 2010 • 750118 commentaires

Si vous vous languissiez (je reprends sciemment le « languir » utilisé à plusieurs reprises par notre ami Cyril Lignac lors de la finale de Top Chef) d’une nouvelle note sur ce blog, sachez que mon quotidien de journaliste fut bien mouvementé ces derniers temps… Après un reportage en Bourgogne, j’étais invitée à participer en tant que jury (vu sur le JT de Jean-Pierre Pernaut un 1er avril, ça ne s’invente pas) à la finale du Championnat de France de Dessert à Strasbourg présidée par Chrystelle Brua, chef-pâtissière du Pré Catelan. Une expérience peu commune, deux jours et quelques 32 desserts à déguster, disséquer, comparer… Trêve de digression, me voici remise pour vous raconter ce dîner au Chateaubriand, qui comme vous l’avez peut-être lu dans le guide Mignot ne m’a pas séduit comme d’autres, même si j’y avais goûté des traits audacieux, le niveau sonore ajouté au service se voulant négligé-sexy, barbe de 3 jours, tablier noué serré sur la taille et col de chemise blanche négligemment ouvert, pouvaient rentrer dans un genre qui me laissait perplexe. Bref, il est 20h, nous prenons place un soir de semaine au Chateaubriand qui battra le plein d’ici une heure. Pas de chichi dans le décor, celui-ci est sans âge, sans appartenance, ou alors au registre du bistrot classique à la française, quoiqu’on pourrait tout aussi bien être dans un salon de thé espagnol, vous savez, celui où vous dégustez un chocolat chaud & churros, avec ses serveurs en noir et blanc, les mêmes depuis 40 ans (bien loin des serveurs du Chateaubriand). Bref, banquettes sombres, tables en bois brut, vieux carrelage, lumière plus ou moins diffuse et tables rapprochées. Et le menu unique à 45 €. Aux commandes, Inaki Aizpitarte, enfin pas ce jour-là, puisqu’il était en vacances, c’était donc son second qui officiait, parfaitement je dois dire.

350-ChateaubriandThème du radis, de l’acidulé et du citron caviar, mise en jambe pas mal.

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Alors là, je rentre bien plus dans mon repas, asperge verte à peine rôtie, burrata qui dégouline de tous côtés, assaisonnement juste, pimpant, herbes folles et échalotes crues, une bouffée de printemps.

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Limande sole, carottes et kumquats, un jus vitaminé par dessus, la sole est superbement cuite, le tableau parfait.

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Pour éviter toute méprise, je dînais ce jour-là avec un ami bien connaisseur des lieux, de l’équipe et des chefs, nous avons donc eu droit à un plat qui s’ajoutait à tous ceux du menu. Agneau rosé, artichaut et olives noires, un accord sur le thème de l’amertume avec une pointe d’astringence, que j’ai beaucoup, beaucoup apprécié.

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Troisième plat donc, presa, vinaigrette. Le (la ?) presa est une partie du filet d’un cochon ibérique, une pièce de tendresse servie rosée. Avant de savoir que c’est du cochon, vous pourriez tout imaginer. Il est accompagné d’une sauce à la tomate, aux graines de moutarde et à d’autres condiments, ainsi que des cubes de pommes imprégnés de jus de céleri (sous-vide), à la saveur assez déconcertante.

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Assiette de fromage pour le moins surprenante, vieux gouda friable et parfumé, navet émincé, herbes, feuilles, c’est divin !

Côté dessert, je n’ai pas été très séduite par la quenelle de glace chocolat sur le croustillant au cumin, pas mal sans plus. Il semble que cela ne soit pas le fort du Chateaubriand. Alors, à l’issue, pensais-je à tout de suite réserver pour un prochain dîner ? Oui, enfin non, comme la dernière fois, le niveau sonore a eu raison de moi, je fais partie de ces gens pour qui la dégustation s’accompagne non pas d’un silence de mort, mais d’une quiétude qui me laisse le pouvoir de saliver à chaque arrivée de plat. Je me suis régalée à n’en point douter, mais dans mon esprit (vous allez me penser perturbée), le bruit ambiant arriverait presque comme une guillotine dans la perception des plats. A vous de voir !

Le Chateaubriand, 129 avenue Parmentier, 75011 Paris, 01 43 57 45 95, métro Parmentier

Edit : mince alors, pas fait exprès, à 18h23, je tombe sur le dossier restaurants de la semaine du Figaroscope intitulé « Silence on mange », avec une interview de Christian Hugonnet, ­ingénieur acousticien, c’est ici

8 réponses à Le Chateaubriand

  1. Dibi dit :

    Oh, vous n’êtes pas très gentille avec le pauvre C. Lignac : en fait, en Occitanie, « (se) languir » n’est pas du tout soutenu, c’est simplement l’équivalent d' »avoir hâte » en français standard – cette dernière expression étant, pour le coup, ressentie comme plutôt formelle dans le Sud-Ouest – perso, je ne l’avais jamais utilisée avant d’arriver à Paris, j’ai toujours dit « il me tarde ».
    Un petit post sur Top Chef, justement ? Ce serait bien d’avoir votre avis.

  2. Bon j’ai enlevé ce qui pouvait être mal perçu et inutile. Je le taquine un peu, voilà tout… Merci en tout cas pour cette leçon !
    Quant à un post sur Top Chef, je ne crois pas. J’ai regardé la première, la dernière, disons que mon oeil exercé du matin au soir a du mal à supporter quelques 3h d’émission de cuisine, dans laquelle on ne voit pas beaucoup de cuisine. Pour le reste, c’est beaucoup de montage télé-réalité.

  3. Dibi dit :

    Oui totalement, avec les effets de caméra & l’insupportable habillage musical qui va avec (beaucoup de pop FM à piano) ; et assez bizarrement, ils rajoutaient parfois des sous-titres lorsque les gens du Sud parlaient…
    Sinon, c’était quand même fun !

  4. Potenta dit :

    won’t you please add a google translate toolbar to you blog page 😀

  5. Bip dit :

    Ils ont augmenté la taille des portions au Chateaubriand ou ça ressemble toujours à des repas pour parisienne de 30 ans ?

  6. Fli dit :

    Bonsoir Caroline, vous devez sûrement être au courant, mais au cas où, je me permets de vous signaler que vous êtes passée dans l’émission 7 à 8 de ce dimanche, dans le reportage consacré au Championnat de France des desserts. Bonne continuation !

  7. – Dibi, entièrement d’accord avec vous ! Qu’est ce que c’est que cette manie (française ?) de mettre des sous-titres sous les parleurs francophones aux accents languedocien, marseillais, toulousain, africain… ça a le don de m’énerver !!!
    – Polenta, je vais essayer de me renseigner, is it possible ?
    – Bip, j’y étais avec UN trentenaire, il y avait un couple de sexagénaires à côté de nous, tout le monde semblait manger à sa faim.
    Et si je puis me permettre, la trentenaire parisienne que je suis a le même appétit qu’un mangeur gourmand qui se respecte !
    – Fli, merci ! Et oui j’étais au courant…

  8. Carole dit :

    … PLUMA, pour le filet tendre tendre de cochon. Et non pas PRESA. À tomber, je trouve. On hésite… bœuf ? agneau de lait ? et ce goût ? À Paris, on se fournit là : http://www.bellota-bellota.com/
    Quant au Chateaubriand, je suis un peu perplexe. Les premières fois, on est saisis, les sens émerveillés. Après, c’est comme un tour qui aurait perdu de sa magie parce qu’on vous a montré le truc… Cuisine éphémère. On peut bien tomber un soir, moins bien un autre.

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